Le Clos du Cers
RENCONTRES VIGNERONNES
Le Clos du Cers
Paul et Sarah Refalo, 28 et 29 ans, viennent tout juste de s’installer à Cruscades où ils ont fondé leur cave particulière, le Clos du Cers.
Leurs 3 vins de Corbières, qui viennent de voir le jour, en ont de beaux jours devant eux !
Qu’est-ce qui vous a amené à vous installer à Cruscades ?
Paul : Nous avons repris le domaine familial. Je représente la 6ème génération… Mon arrière-grand-père avait légué les vignes à mon oncle, puis ce sont mes parents qui ont pris la relève en 2006. Alors qu’ils apportaient tout à la cave coopérative, nous avons décidé de créer notre cave particulière : nous exploitons 5 hectares pour faire nos bouteilles, et apportons la récolte des 5 hectares restants aux Celliers d’Orfée.
Comment s’est passée votre installation ?
Sarah : Nous louons une cave dans le village, que nous avons aménagée l’an dernier avec du matériel d’occasion racheté à différents domaines du coin. Nous cherchions des cuves basses et larges, car nous travaillons en gravité, sans recourir à une pompe. Cette technique nous vient de nos expériences aux États-Unis et en Nouvelle Zélande.
Comment vous êtes-vous formés ?
Sarah : Je suis américaine, donc j’ai fait mes études aux États-Unis. D’abord en littérature, avant de bifurquer vers la sommellerie. J’avais dans l’idée de travailler dans les vignes… Donc lorsque s’est présentée à moi l’opportunité d’aller travailler en Nouvelle Zélande pendant quelques mois, j’ai sauté sur l’occasion ! Et c’est là-bas que j’ai rencontré Paul.
Paul : J’ai fait des études de viticulture-œnologie à Carcassonne, puis je suis parti travailler en Nouvelle-Zélande avant de revenir (avec Sarah !) faire une licence pro de commerce des vins à Angers. Ensuite nous avons fait ensemble une vinification en Californie, une autre dans l’État de New York… Puis retour à Cruscades !
Pourquoi avoir choisi le nom Clos du Cers ?
Sarah : Quand je suis arrivée ici, tout le monde parlait du Cers autour de moi… C’est le symbole de notre travail, on fait tout en fonction de ce vent que seul les Audois appellent ainsi. Et puis accolé à « Cers », on trouvait que « Clos » sonnait mieux que « Domaine ».
Pourquoi avez-vous décidé de créer une cave particulière ?
Paul : Quand on a commencé à se fréquenter en Nouvelle-Zélande, Sarah ne comprenait pas que je puisse envisager de reprendre les vignes de ma famille sans créer ma propre cave.
Sarah : Avec mon point de vue américain, je trouvais inconcevable d’avoir une telle opportunité et de ne pas la saisir ! J’avoue avoir mis un peu la pression à Paul (rires), c’est ma personnalité !
Vous avez aussi créé un caveau de dégustation…
Sarah : Oui, juste derrière la cave. L’idée était de créer un lieu de rencontre et de convivialité dans ce petit village calme qui n’a ni restaurant ni boulangerie… On a chiné des meubles, un voisin nous a vendu le bar et mon père l’a restauré… On s’est dit qu’on pourrait organiser des événements, des soirées et des dégustations de notre vin. Nous souhaitons recevoir les gens, mais aussi les informer sur notre vin et leur transmettre notre passion.
Avez-vous créé une gamme ?
Paul : Nous commercialisons cette année nos premières bouteilles : un blanc, un rosé et un rouge ! Il s’agit d’une gamme socle, que l’on veut représentative de l’appellation Corbières.
Comment décririez-vous votre rouge ?
Paul : C’est un assemblage de Carignan, Mourvèdre, Grenache et Syrah, avec une dominante de Syrah, vinifié en « semi macération carbonique » : on égrappe tout, mais comme on travaille par gravité, tous les raisins restent entiers. Il y a donc une phase de fermentation liquide et une autre solide. Puis une fois qu’on presse, on assemble ces deux parties.
Sarah : Cette méthode est très utilisée dans le nouveau monde. Elle donne un vin buvable dans l’année, fruité, souple, mais avec de la structure et des tanins fondus.
Et votre rosé ?
Paul : Il est fait en pressurage direct, avec le même assemblage que notre rouge. Il est un peu foncé à cause de la Syrah, mais il est aussi gourmand et riche. Structuré, fruité, doté d’une belle acidité, on peut le boire en mangeant, pas seulement à l’apéritif.
Sarah : Oui, ce n’est pas un rosé de piscine ! On adore le rosé, mais avec un peu de corps.
Un mot sur votre blanc ?
Sarah : C’est un assemblage de Marsanne et de Grenache blanc (50-50). Il est souple, rond et fruité, avec une bonne tension et une touche d’agrumes. J’en suis contente, surtout pour une première année. Maintenant, il faut que l’on continue à l’améliorer en sélectionnant des cépages adaptés au climat.
Paul : Nous avons planté un hectare de Vermentino l’an dernier, et nous apprêtons à planter du Picpoul. Vraiment, on essaie d’explorer le potentiel Corbières blanc. C’est une niche dans les Corbières… Cela nous plait, on sait qu’on peut arriver à faire des produits intéressants en gardant de la fraîcheur et de l’acidité.
Quel est votre credo en tant que vignerons ?
Paul : Nous faisons des vins que nous aimons et qui nous plaisent. On imprime notre caractère et notre personnalité dans nos vins pour nous différencier. Ils racontent notre histoire et on prend plaisir à les partager avec les gens qui viennent les déguster. C’est pour ça qu’on fait ce métier.
Sarah : On fait un vin orange cette année… Pour s’amuser ! Il est important pour nous de conserver le côté divertissant du métier et de garder l’esprit ouvert. L’étiquette est déjà prête : c’est une photo de l’arrière-grand-père de Paul, avec sur ses genoux son oncle enfant et son arrière-grand-mère. En route pour aller vider le raisin à la cave, ils sont assis sur son tracteur, récupéré suite au débarquement américain, ce qui est aussi un clin d’œil à mon pays .
Quels sont vos projets ?
Sarah : Nous sommes en 2e année de conversion biologique. D’ailleurs, on vient juste de finir d’arracher les herbes à la main dans notre plantier de Vermentino… Comme l’intercep aurait abîmé les jeunes plants, on a passé des heures à genoux dans la terre (rires) ! Bref, l’an prochain, nous aurons le label AB.
Paul : Elle est encore en barrique mais nous sortons bientôt une nouvelle cuvée : la François Calmon, du nom de mon arrière-grand-père.