Christophe Cambriel
RENCONTRES VIGNERONNES
Christophe Cambriel
Interview de Christophe Cambriel du Château Cambriel
Christophe Cambriel, vigneron au Château Cambriel depuis 2000, vient d’obtenir une médaille d’or au Concours Corbières pour un étonnant vin blanc vinifié et élevé sur lie en fût de chêne durant 6-7mois… A tester de toute urgence !
Quelle est l’histoire du Château Cambriel ?
Le domaine actuel est le fruit de la fusion de la propriété viticole que mes parents avaient sur le village d’Ornaisons avec les parcelles que j’ai achetées moi-même en m’installant comme vigneron en 2000. J’envisageais depuis un petit moment de devenir vigneron, mais le domaine de mes parents n’était pas assez grand pour faire vivre deux familles. C’est l’opportunité d’acheter 15 hectares à remettre en valeur qui m’a fait revenir sur le territoire.
Qu’avez-vous fait dans votre « première vie », avant le Château Cambriel ?
J’ai effectué des études de technico-commercial en vin, et travaillé pendant 7 ans chez un négociant en vin, le Domaine Virginie, surtout dans les domaines du packaging et de la gestion des mises en bouteille.
Voilà 18 ans que vous êtes à la tête du domaine. Comment l’avez-vous fait évoluer ?
Très tôt, nous avons « ré-encépagé » car les vignobles étaient en fin de carrière. Nous avons replanté des Syrah et des Grenache. La rénovation du vignoble s’est accompagnée de celle du chai, situé à Ornaisons à proximité des vignes. Puis nous avons construit sur un terrain à part le caveau de vente, attenant à un espace de stockage des bouteilles et des barriques. Notre but était de créer un écrin aux normes écologiques pour optimiser le stockage des bouteilles. Pour cela, nous avons eu recours à des briques « mono mur ». Ces briques de 37cm d’épaisseur, remplies d’air et que l’on enduit de crépi, évitent de climatiser et permettent de maintenir la température du chai à 18/19 degrés toute l’année !
Quelle est la production du domaine ?
Nous produisons entre 50 000 et 60 000 bouteilles par an sur 50 hectares, que nous vendons au caveau d’Ornaisons, sur Internet (plateforme Plugwine à Macon), à l’export, ainsi que sur de petits salons en France et en Belgique. Mais nous demeurons à ce jour une structure familiale, pas encore bien structurée sur le plan commercial. Nous avons tellement investi sur le vignoble et les bâtiments… On ne peut pas tout faire en même temps !
Comment êtes-vous structurés aujourd’hui pour faire tourner l’entreprise ?
Je suis associé avec mon jeune frère, qui a 18 ans de moins que moi. Il est arrivé quand nos parents ont pris la retraite, en 2013. Mon épouse est en charge de la comptabilité et de la vente, et nous avons 2 ou 3 employés en permanence. Et bien sûr mon père André Cambriel, en tant que patriarche, garde un œil sur son bébé ! C’est lui qui m’a mis le nez dans le vin et transmis sa passion. Car c’est un métier tellement contraignant, avec beaucoup d’heures, qu’il faut vraiment être passionné !
Trouvez-vous toujours autant de plaisir dans votre métier que par le passé ?
Oui, le plaisir de créer du vin est intact… Et puis il y aussi le plaisir de la rencontre avec les collègues. On a la chance de faire 7 à 8 salons de vins par an, sur lesquels on revoit des amis de toutes les régions de France. Et puis en ce moment, avec le développement des Dénominations Géographiques Complémentaires (DGC), nous nous réunissons souvent avec les vignerons du Lézignanais pour des séances de dégustation.
Où en est ce projet de DGC ?
La DGC « Terrasses de Lézignan » ne devrait pas tarder à voir le jour… Nous nous sommes réunis dernièrement avec les collègues et avons constaté que nous avions tous déjà des profils de vins plus ou moins similaires. La tendance se définit peu à peu… Personnellement, j’ai déjà fait des essais de vinification pour voir ce que cela pourrait donner au Château Cambriel. Nous sommes une douzaine aujourd’hui. Cependant à terme, tous les vignerons du terroir devraient suivre car l’idée n’est pas de tout produire en DGC, mais que chaque domaine consacre une petite partie de sa récolte aux cuvées DGC.
Quels sont les vins Cambriel AOC Corbières ?
Nous avons deux rouges, un rosé et deux blancs.
Nous avons énormément investi dans les blancs ces trois dernières années, notamment pour créer un vin blanc passé en barrique (fût de chêne) avec élevage sur lie pendant 6 mois. En parallèle, nous proposons un blanc plus classique, non élevé, dans une jolie bouteille avec bouchon en verre et fond décoré.
Pour faire notre rosé, à base de Grenache gris et Cinsault, nous avons dû replanter beaucoup de vigne, afin que les cépages soient plus adaptés à notre exigence de qualité. Idem pour la syrah pour le vin rouge… Nous avons d’une part la Cuvée Tradition, typique de l’appellation Corbières, avec les 4 cépages usuels, très sur le fruit et non passé en barrique. Et d’autre part, nous proposons notre Tête de cuvée, un peu plus haut de gamme, à base de Vieux Carignan et Grenache, plus travaillé et élevé en barrique pendant 12 mois. Il s’agit d’un vin d’hiver et repas de week-end.
De 6,50 à 12€
Lequel de vos vins a obtenu la médaille d’or au Concours Corbières 2018 ?
C’est notre vin blanc vinifié en barrique et élevé sur lie pendant 6 mois qui a remporté la médaille. On vient de mettre en bouteille le 3ème millésime, c’est donc une création assez récente… Pour le créer, nous avons replanté du Grenache blanc que l’on n’avait plus, et l’avons assemblé à de la Marsanne, de la Roussanne et du Maccabeu. Ce vin est très sur le fruit, assez gras grâce à l’élevage sur lie, assez explosif. C’est un vin gastronomique qui se marie très bien avec du poisson en sauce ou des seiches à la plancha par exemple. A l’apéritif aussi, c’est très très bon !
Qu’est-ce qui vous plait le plus dans votre métier ?
C’est différent tous les jours, il y a tant d’imprévus… Presque trop ! Parfois, la nature ne nous gâte pas. Les 3 dernières années notamment ont été compliquées : sècheresse, puis gel, puis mildiou. Cependant cette année, jusqu’à présent tout va bien !
Que regrettez-vous le plus dans votre métier ?
Notre problème majeur provient de la difficulté de recruter des gens qui aient la même passion que nous. Salariés et patrons n’ont pas toujours les mêmes objectifs… On essaie de faire notre métier du mieux que l’on peut, mais cela demande du personnel compétent. Or comme nous sommes contraints de consacrer beaucoup de temps aux tâches administratives, il nous faut de la main d’œuvre.
Quelles initiatives prenez-vous pour la préservation de l’environnement ?
Nous avons démarré la confusion sexuelle il y a 3 ans, et avons depuis l’an passé le système à l’ensemble du domaine, qui couvre 50 hectares. D’autre part, nous visons une certifications HVE niveau 3 cette année. J’avais déjà étudié le dossier il y a 2 ans, mais l’an dernier les conditions climatiques ne m’ont pas permis de le faire.
Quid de la conversion bio ?
Pour un domaine de 50 hectares comme le nôtre, cela demande un investissement de taille. On l’envisage ! C’est un projet d’entreprise que j’ai déjà étudié mais qui n’est pas encore à l’ordre du jour en raison du manque de personnel. Cependant on limite déjà fortement les traitements. Quand on peut faire du préventif, on le fait car on ne pratique pas les traitements phytosanitaires par plaisir!
Quel est votre objectif pour les vins Cambriel ?
Nous ne faisons pas du vin pour faire du vin, mais visons une qualité optimale, notamment grâce à de bons cépages et une maturité de raisin idéale. A l’arrivée de mon frère en 2013, nous avons poursuivi la rénovation du vignoble en arrachant et replantant les 15 hectares que nous venions de racheter… Et puis le goutte à goutte aide. Nous avons déjà installé ce système d’arrosage sur 15 hectares, et consacrons chaque année une part de notre budget à l’augmentation de la surface équipée. Petit à petit, d’année en année, nous ne cessons d’améliorer nos vins !